Elle était de retour dans ses bras et Sasha ne pu s'empêcher de sourire. Il avait gagné ! Enfin, "gagné" était un bien grand mot. Il avait réussi à faire en sorte qu'elle cède et qu'elle ne lui hurle pas dessus. A vrai dire, ce fut sa plus grande crainte. Que Rose plonge dans une colère noire et qu'ils se séparent juste avant son départ. Partir en expédition quand l'amour de votre vie vous fait la gueule ce n'est jamais top. Il aurait probablement eu l'esprit préoccupé et n'aurait pas porté attention à la mission comme il le fallait. Heureusement, ce ne fut pas le cas.

Il resserra ses mains autour de sa taille. Elle était si fine, si petite et fragile. C'était toujours délicat pour lui de la tenir dans ses bras. Il avait l'angoisse que son pouvoir s'enclenche sous l'émotion et qu'il lui fasse mal sans s'en rendre compte. Ce n'est jamais arrivé, mais Sasha connaissait l'étendu de son pouvoir. Il passa enfin une main dans les cheveux de la jeune femme, et lui déposa un doux baiser sur le sommet de sa tête pour la rassurer.

Rose lui expliqua son angoisse d'être un élément inutile à la société. C'était le cas pour beaucoup de personne à Alticio. Le nombre de CV ne faisait qu'augmenter sur les chantiers. Etonnamment, tout le monde souhaitait se rendre utile. C'était l'engouement de la ville et des nouveaux colons. Les plus anciens avaient tous leur place et ne s'ennuyaient jamais. Il y avait toujours quelque chose à faire dans une ville en pleine construction et personne n'était inutile. Bien sûr, Rose n'allait pas attendre le retour de Sasha les bras ballants. Elle était en charge de l'entretien de l'enclos. Elle aurait de quoi s'occuper. Sasha lui prit la tête entre ses deux mains et la considéra avec beaucoup de bienveillance.

- Rose ... tu es tout sauf inutile. Tu as de quoi t'occuper à l'enclos. Surveiller, entretenir ces créatures et les observer c'est très important pour la ville. Il faut savoir si on peut les apprivoiser, en faire des montures ou même les manger. Avec les transformations génétiques qu'elles ont subis, on n'est sûr de rien. Imagine que tu montes sur l'un de ces guépards du désert et que des piques lui pousse dans le dos quand tu as le cul posé sur lui ... aie aie aie !

Il imita une douleur imaginaire en serrant les dents, puis se mit à rire de bon coeur. Sasha souhaitait le meilleur pour Rose et savait qu'elle parviendrait à surmonter ce moment d'absence. Il glissa un doigt sur son visage froid, et replaça une mèche rebelle derrière son oreille.

- Je sais ... tu viens de rentrer et moi je pars ... mais il nous reste quelques jours pour être ensemble avant l'expédition. On pourrait ... je ne sais pas ... aller chez moi nous réchauffer. On y passerait la nuit ensemble. Qu'en dis-tu ?

Son coeur battait fort. Encore jamais Sasha n'avait osé convier Rose dans sa piaule. Il avait toujours eu trop peur de la blesser avec une émotion trop forte. Mais là, les hormones le poussait à faire le premier pas, briser l'interdiction qu'il s'était fixé. S'il devait se tenir devant elle une dernière fois, alors il voulait lui faire l'amour avant de partir. Ce désir était hardant, fort et sincère. Il espérait simplement qu'elle ait la même envie que lui.

Il avait tellement l'air de prendre ça à la légère que s'en était presque perturbant. Rose ne connaissait pas grand chose à la Zone Extérieure. Mais elle avait entendu Claire en parler à plusieurs reprises et rien qu'à imaginer cet infini espace, ça lui glaçait le sang. Il ne se rendait pas bien compte des choses qui l'attendaient là bas. La jeunesse fougueuse et insouciante. En y pensant, Rose avait l'impression d'être une vieille personne de 90 ans. Brrr ... elle secoua la tête à cette pensée. Ca ne lui ressemblait pas.

Peut-être qu'elle avait trop trainé avec ses amis de New York qui n'avaient fait que critiquer Alticio comme un lieu dangereux qui regroupait des personnes détraquées du cerveau. Mais en observant Sasha, ce qu'elle ressentait était tout autre. Il inspirait l'espoir, le renouveau. C'était un jeune homme plein d'énergie, toujours positif et qui avait le don de tout tourner à la dérision. Bien sûr, elle aurait voulu qu'il se montre parfois plus prudent dans ses entreprises, mais qui était-elle pour le freiner ? Certainement pas sa mère. Elle devait l'épauler, le soutenir dans ses envies. Comme il l'avait toujours fait avec elle.

Ses petits gestes tendres avaient le don de ramollir le coeur tout mou de la jeune Alticienne. Elle fondait en lui et n'éprouvait qu'un sentiment de bonheur. La peur qui l'avait tétanisé quelques minutes plus tôt venait de s'envoler. Elle avait simplement envie de profiter de l'instant présent et de ne ressentir qu'un sentiment de plénitude et d'amour. Le reste n'était que superflu. Jusqu'au moment où la réalité reprendrait le dessus comme une violente claque. Mais pour l'instant, il fallait profiter de ces petits moments de bonheur.

Quand Sasha lui proposa qu'elle l'accompagne dans ses appartements, le coeur de Rose s'emballa. Une vague de frissons lui parcourut l'échine dès qu'il effleurait sa peau. Ses joues froides se remplissaient de chaleur et ses cheveux commencèrent à frisotter. Un sourire un peu bête se dessina sur le coin de ses lèvres.

- Oui ... oui bien sûr. On peut passer la nuit chez toi.

Elle lui attrapa la main et y glissa ses doigts dans la main de Sasha. Elle savait ce qui allait se passer, elle n'était née de la dernière pluie. Depuis le temps qu'elle attendait ce moment. Depuis la fois où ils avaient échangé leur premier baiser, elle avait espéré se retrouver sous la couette à ses côtés. Bien sûr, ils avaient dormi ensemble, ils s'étaient caressé, embrassés, et tout ce qui a de plus mignon dans un couple. Mais jamais encore ils n'avaient fait l'amour. Sasha lui avait expliqué ses raisons et ses craintes. Alors jamais Rose n'avait insisté. Elle laisserait le temps en décider. Et si Sasha lui proposait ce moment intime à eux deux, alors c'est qu'il était prêt.

Plus ils s'approchaient de sa maison, plus son coeur battait la chamade. Rose posa sa tête sur l'épaule de Sasha, ses mains agrippées à son bras. Elle rêvait de ce moment et son rêve allait devenir réalité.