Ca y est le froid et l’humidité avaient pris place dans le château et les environs. Heureusement la salle commune de Poufsouffle restait, pour moi, l’endroit le plus chaleureux de Poudlard. La journée de cours avait été particulièrement éprouvante. Entre les cours de Défense Contre les Forces du Mal qui nous obligeaient à pratiquer des sortilèges complexes et les cours de Métamorphose qui me donnaient un mal de crâne à chaque sortilège lancé, j’avais l’impression que mon cerveau était passé sous un rouleau compresseur. Je n’étais pourtant pas mauvais élève, mais la complexité des sortilèges de cette année me donnait un sentiment d’échec constant depuis le début de l’année.

J’avais espoir que les choses s’améliorent, mais pour le moment, ce n’était pas le cas. Il pleuvait des cordes au dehors, et je n’avais pas pris la peine d’essayer de mettre le nez en dehors des couloirs aujourd’hui. D’ordinaire, je serais allé voir Talla pour négocier un petit entrainement sur le terrain de Quidditch après les cours. Mais il pleuvait trop, il faisait trop sombre et il serait trop dangereux de monter sur un balai par ce temps. Surtout pour un entrainement. Alors j’avais pris la direction du club de duel pour m’entrainer avec Esteban. On s’entendait plutôt bien et j’avais espoir de dérouiller un peu ma carcasse après une journée entière passée sur les bancs de l’école.

Esteban ne lésina pas sur les coups. J’arrivais pas à contrer ses sorts correctement, si bien qu’au bout du troisième échec et de la cinquième chute, je lui fis signe que j’en avais assez. Je remontais vers la salle commune, l’épaule endolorie et me réfugia dans un fauteuil moelleux face à l’énorme cheminée, mon endroit favori. Cinq petits blaireaux dansaient au dessus de l’âtre. Sur la table basse, un saladier rempli de bonbons tout droit sortis de chez Zonko m’appelait de leurs couleurs multiples. L’heure du souper serait dans moins d’une heure, mais j’avais trop faim pour résister à l’appel. Alors j’en pris une poignée et posa mes souliers sur le pouf en face de moi, étendant mes jambes de manière confortable.

Ca faisait du bien de se poser, de ne penser à rien et de n’écouter que le crépitement du feu de cheminée. Je fermais les yeux un instant, avant de les ouvrir lorsque je sentis un parfum singulier et une ombre familière à mes côtés. C’était Rose qui s’étaient installée.

- Rose ! Salut …

Je me redressais pour lui déposer un doux baiser sur la joue. J’étais content de la voir.

- Tu vas bien ? Tu as passé une bonne journée ? Aie …

En me redressant, mon épaule me lancinait à nouveau. Automatiquement, je portais ma main dessus, grimaçant sous l’effet de la douleur.

- Ce n’est rien t’inquiète pas … c’est Esteban qui a eu la main un peu lourde sur les sortilèges de Stupefixion.

Depuis la rentrée scolaire Rose Peterson avait l’impression de courir partout et de ne jamais trouver le temps pour se poser. Poudlard était trop grand ! Oui c’était indéniable. Dès qu’elle sortait de la Salle Commune de Poufsouffle, elle avait l’impression de devoir courir à longueur de journée pour accéder à une salle, puis une autre, tout en espérant que les escaliers ne soient pas trop capricieux. Elle s’était inscrite à de trop nombreuses activités selon elle. Peut-être qu’elle aurait du voir moins gros. Mais c’était la dernière année où elle pouvait s’autoriser autant de clubs, de sorties scolaires ou d’activités extrascolaire. Et Rose voulait en profiter un maximum. Mais peut-être qu’elle avait eu les yeux plus gros que le ventre.

Alors c’est en fin de journée, exténuée, qu’elle passa la porte de la salle commune. Elle adorait cet endroit. Une vaste salle, haute de plafond avec des chaudrons suspendus en l’air dont des plantes grimpantes dégringolaient d’un peu partout. Elle avait la sensation d’être dans une sorte de tanière bien aménagée avec ses nombreux tableaux, ses tapis usés, ses coins lectures, jeux, où les élèves se regroupaient pour discuter, rigoler, s’amuser. Elle passa devant des filles de sa promo en leur adressa un petit sourire fatigué, puis se dirigea vers l’énorme cheminée. Le portait d’Elga Poufsouffle épiait d’un air bienveillant la silhouette endormie de Sasha.

Rose s’installa à côté du garçon qu’elle aimait tant, sans dire le moindre mot. Elle l’observait juste. Il avait l’air tout aussi épuisé qu’elle. Puis soudain, il se réveilla et instinctivement, elle lui sourit. Il lui demanda si elle avait passé une bonne journée et au même moment un rictus de douleur se forma sur son visage. Inquiète, Rose se leva du fauteuil dans lequel elle avait prit place. Mais Sasha la rassura en lui indiquant qu’il s’était battu en duel avec Esteban. Devait-elle être vraiment rassurée ? Esteban Tyler était une brute … un idiot sans cervelle. Elle ne comprenait d’ailleurs pas l’amitié qui liait son petit ami à ce Troll.

« Tu t’es encore battu en duel contre lui ? Mais à chaque fois c’est pareil Sasha … Esteban ne se montrera jamais doux ou conciliant … c’est un Troll à gros bras qui n’agit que dans l’agression. Il suffit de voir son jeu au Quidditch. D’ailleurs … tu ne t’entraine pas aujourd’hui ? J’ai croisé Talla dans les couloirs toute à l’heure. »

Elle déposa une main réconfortante sur l’épaule solide de Sasha. Rose avait envie de se blottir dans ses bras, de s’installer confortablement contre son corps, sous un lourd plaid, face à la cheminée. Mais il était interdit de faire des démonstrations physiques et amoureuses dans Poudlard. Du moins, sous les yeux de leurs camarades.

« Tu veux du chocolat chaud ? J’ai enchanté une théière pour qu’elle en produise. »

Rose indiqua un petit service à thé en porcelaine qui se trouvait sur une petite table en fer forgé à côté de la cheminée. Elle avait appris ce sortilège durant son cours de cuisine magique.

« Avec toutes les options que j’ai pris cette année … il faut bien que j’en ai l’utilité dans mon quotidien. Et pour ton épaule … tu devrais passer à l’infirmerie. On ne sait jamais, c’est peut-être grave. Ca serait dommage que tu ne puisses pas jouer au Quidditch à cause d’Esteban. Vous avez déjà perdu Mike. »

J’avais l’impression que ma vie était rythmée entre les entrainements de Quidditch, les révisions pour l’examen de fin d’année et les duels. Et Rose me le rappelait. L’entrainement. Merde ! J’avais complètement zappé. Si elle avait croisé Talla dans les couloirs, c’est que la capitaine me cherchait. Et j’imaginais pas la gueule qu’elle ferait si elle apprenait que je me trouvais assis dans un fauteuil au coin du feu, l’épaule endolorie, alors que ma place était certainement sur le terrain de Quidditch actuellement. Merde, merde, merde …

Je soufflais lourdement en levant les yeux au ciel et en me massant l’épaule. Elle me tirait, me faisait mal. Sacré Esteban … un jour je l’aurai et c’est lui qui ressortirait de nos combats le bras en écharpe. Rose ne pouvait pas comprendre ce principe. Et ça me faisait toujours sourire de voir sa naïveté.

- Ha mince le Quidditch … si j’étais censé avoir un entrainement là … bah, de toute façon, avec l’état de mon épaule, c’est pas possible de mettre une dérouillée à un Cognard. Je risquerai d’empirer ma blessure plus qu’autre chose. Talla comprendra.

Mouais, j’étais peu convaincu par mes propos. Mais c’était surtout pour rassurer Rose dans tous les cas. Elle posa sa main sur mon épaule. J’émis un petit rictus désagréable, même si le contacte de ses doigts sur mon sweat me faisait du bien. Curieuse sensation.

- Oui carrément ! Va pour un chocolat !

On était pas en hiver non plus, mais l’automne avait bien prit sa place avec ses pluies incessantes. Si bien que l’humidité avait pris sa place dans tout le château, faisant clairement descendre les températures. J’observais Rose agir. Elle usait d’un sortilège pour préparer le chocolat chaud dans une théière en porcelaine posée sur la table basse. Ca m’impressionnait toujours ce genre de magie que je ne maitrisais pas. Moi j’étais plutôt sportif et rentre dedans. Un peu comme Esteban mais en moins bourru.

- Oui j’irai à l’infirmerie ne t’inquiète pas. Je ne compte pas rester dans cet état bien longtemps. C’est juste qu’il est tard là. Je doute que l’infirmière soit encore présente à cette heure-ci. Et cessons de parler de Mike veux-tu ?

On en avait déjà pas mal parlé avec les copains, mais ça Rose n’était pas au courant. Elle me tendit le chocolat chaud que j’acceptais volontiers entre mes grandes mains.

- Merci pour le chocolat. lui dis-je en lui glissant un baiser sur la joue. Et toi ? Comment s’est passée ta journée ? Mieux que moi j’espère !